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Désert des Agriates
Désert des Agriates Santo-Pietro-di-Tenda Haute-Corse
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Le désert des Agriates, situé au nord-ouest de la Corse, entre Saint-Florent et l’Île-Rousse, est une région sauvage et fascinante qui s’étend sur environ 15 000 hectares. Malgré son nom, il ne s’agit pas d’un désert au sens classique de dunes de sable arides, mais plutôt d’une vaste étendue de maquis corse, ponctuée de collines rocailleuses, de végétation basse et de rares arbres. Ce paysage, à la fois rude et magnifique, est bordé par des plages paradisiaques parmi les plus belles de l’île, comme Saleccia et Lotu, accessibles principalement par bateau ou par des pistes difficiles.
Une histoire marquée par l'homme et la nature :
Historiquement, les Agriates n’ont pas toujours été un "désert". Jusqu’au Moyen Âge, cette région était fertile et peuplée. Sous l’administration pisane (XIe-XIIIe siècles), puis génoise (XIIIe-XVIIIe siècles), elle était surnommée le "grenier de la Corse" grâce à ses cultures de blé, d’oliviers et de vignes, ainsi que son élevage. Des villages, comme ceux de Casta ou d’Occi (aujourd’hui en ruines), prospéraient, et des sentiers reliaient les hameaux aux ports, notamment celui de Saint-Florent. Les Génois y exploitaient aussi le bois pour la construction navale, ce qui a commencé à fragiliser l’écosystème.
Mais ce paysage agricole a décliné à partir du XVIe siècle. Les attaques barbaresques répétées ont poussé les habitants à fuir vers l’intérieur des terres ou des villes côtières fortifiées comme Saint-Florent. À cela s’ajoutent les incendies fréquents, souvent déclenchés par les bergers pour régénérer les pâturages, et l’érosion due au surpâturage et à la déforestation. Au XVIIIe siècle, sous l’administration française, la région était déjà largement abandonnée, ne laissant que des vestiges – murets en pierre sèche, bergeries en ruine et quelques chapelles, comme celle de San Michele près de Casta.
Un écosystème unique :
Aujourd’hui, les Agriates sont un espace préservé, classé comme site naturel protégé depuis 1983 et intégré au Conservatoire du Littoral, qui en possède une grande partie (plus de 5 000 hectares). Le maquis y domine, avec des plantes typiques comme le ciste, la bruyère, le lentisque et l’arbousier, adaptées à un climat méditerranéen sec et venté. On y trouve aussi des espèces animales emblématiques : sangliers, renards, tortues d’Hermann et, en mer, parfois des dauphins près des côtes. L’absence d’eau douce permanente – il n’y a ni rivières ni sources pérennes – renforce cette impression de rudesse, surtout en été sous le soleil brûlant.
Les plages et l'accès :
Les Agriates sont surtout célèbres pour leurs plages, véritables joyaux aux eaux turquoise et au sable blanc. La plage de Saleccia, longue de plus d’un kilomètre, est souvent comparée à une vision caribéenne, entourée de pins parasols et de dunes. La plage de Lotu, plus petite, est tout aussi spectaculaire. Ces lieux sont difficiles d’accès : soit par bateau depuis Saint-Florent (navettes régulières en saison), soit par une piste 4x4 au départ d’Ostriconi ou de Casta (12 km de route cahoteuse), soit à pied via le sentier des douaniers, un parcours de randonnée exigeant mais sublime qui longe le littoral sur 35 km.
Un lieu de contrastes :
Le désert des Agriates incarne un paradoxe : une terre autrefois prospère devenue sauvage, un "désert" qui abrite des plages luxuriantes. C’est aussi un espace de liberté pour les amoureux de nature, mais avec des règles strictes – le camping sauvage y est interdit, et les visiteurs sont encouragés à préserver cet environnement fragile. En été, il attire les touristes, mais hors saison, il retrouve une solitude presque mystique.